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Thé vert et mots d'esprit
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  • Non, Gingembre Confit n'est pas un blog culinaire. Gingembre Confit c'est mon projet de réunir un ensemble de textes inédits qui formeront un livre. Gingembre Confit, c'est ma passion pour les mots, le créatif, l'intrigue. Un imaginaire à découvir...
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Thé vert et mots d'esprit
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11 octobre 2009

"La jalousie aveugle un coeur atteint, et, sans examiner, croit tout ce qu'elle craint" Corneille

a_day__a_lifetime_by_zemotion


AUX LUEURS DE TOKYO

PARTIE VII


***Son moment d'émoi passé, Miyuki reprend vite contenance, non sans avoir effleuré le paysage brodé à la main, avant de refermer le paquet.

***Et quelle est l'utilité de tout ça? Demande-t-elle, acide.

***Je pensais que ça te ferait plaisir.

***Une pute donne du plaisir, elle n'en reçoit pas, et n'a pas besoin d'emballage. Qu'il s'agisse d'un kimono ou d'un tailleur bien ajusté, peu importe. On paye pour le contenu.

***Ichiro se met à rire. S'il est blessé par ses paroles, il n'en montre rien.

***Je ne te savais pas aussi près des conventions, raille-t-il. Par ailleurs, tu semble oublier que lorsqu'on vent un produit, l'apparence extérieure est la première chose qui attire l'œil.

***Ça ne me dit toujours pas pourquoi tu continues à acheter toutes ces futilités...

***Et tout en disant ces mots, elle se lève, le kimono dans les bras, et vient le déposer dans l'armoire coulissante, tout en bas, où, si l'on regarde de plus près, se trouvent plusieurs paquets à l'emballage similaire.

***Tu... tu ne l'essaye pas? Demande Ichiro, quelque peu décontenancé.

***Le jour s'est levé, tu n'as peut-être rien à faire, moi, si, répond sèchement celle-ci.

***Assise sur la couche, dos tourné au jeune homme, elle s'applique à peigner ses longs cheveux noirs de jais, ramenés par côté, au-dessus de son épaule droite. Voyant qu'il n'est pas décidé à bouger, elle lâche sur son habituel ton froid.

***Tu pense partir quand, exactement?

***Pas de réponse. Miyuki sent juste son poids se déplacer sur la couche, puis revenir à sa place initiale. Loin de s'atténuer, la tension se ravive, attisée par le seul feu doux-amer d'un cœur blessé. Un lourd silence s'installe à nouveau dans la petite pièce. C'est d'une voix presque éteinte qu'Ichiro le brise.

***C'est plutôt moi qui devrait te poser cette question... Toute cette froideur, tous ces mots blessants... si tu crois que je ne sais pas pourquoi tu fais tout ça.

***Exaspérée, Miyuki se tourne vers son interlocuteur, mais brusquement se fige. Dans ses mains, il tient la boîte en fer qu'elle avait caché sous la couche. Aussitôt, son cœur s'emballe, ses lèvres se mettent à trembler tandis que ses pupilles se mouillent d'inquiétude.

***─ Depuis quelques mois, les comptes que tu me rends sont de plus en plus irréguliers. Tu croyais pouvoir me cacher encore longtemps ta petite magouille? C'est vraiment me prendre pour le roi des imbéciles!!

***C'en est trop. Miyuki perd ses moyens. Sa fierté, sa froideur... Tout s'effondre. Le rapport de force a changé et elle le sait. Du regard, elle implore le jeune homme, mais celui-ci a fait sauter le couvercle et continue sur sa lancée.

***Alors, c'est pourquoi, cet argent? Tu n'es pas du genre capricieuse, ni très coquette. Attends... Laisse-moi deviner. Une pauvre princesse qui à force de côtoyer les filles des rues est devenue une des leurs, mais qui lassée par ce mode de vie qui empoisonne sa délicatesse et sa fragilité, a décidé de fuir le royaume des catins pour toujours. Je me trompe?

***La jeune fille ne répond pas. Mais son mutisme le fait à sa place.

***Touchant... Tant d'espoirs misés sur un rêve d'enfant. Mais tu n'as pas besoin de moi pour savoir que la réalité est toute autre...

***Arrête!! Arrête...

***Elle a presque crié le premier mot. A nouveau, Miyuki lui tourne le dos, mais c'est plus pour lui cacher les larmes qui se sont mises à couler naturellement.

***Ça suffit... dans l'affaire, c'est moi qui passe pour une idiote. Mais tu ne peux pas me blâmer pour ça. Qui n'a jamais rêvé de s'en sortir? Qui n'a jamais voulu quitter ce monde de merde!!! J'en suis malade, jour après jour, jusqu'aux tripes... Évidemment, tu ne peux pas comprendre. Toi, tu ne vois que le côté plaisant de la chose, ton plaisir égoïste. Mais tu ne regarde jamais plus loin...

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